
« Nous devons faire front ensemble » : paroles d’un jeune agriculteur.

Ecrit par Agropôle 4 min de lecture
(Agropôle) : Comment, en tant qu’agriculteur, ressens-tu la
recrudescence d’intérêt des consommateurs pour l’agriculture suisse ?
(Maxime Hadorn) : Au quotidien, je ne vois pas de changement
car n’ai pas de point de vente directe. Avec notre ferme, nous exploitons des
cultures et des vaches laitières afin d’approvisionner une fromagerie. En
revanche, je vois que ça s’agite de manière positive sur les réseaux sociaux,
les consommateurs s’intéressent plus qu’auparavant à notre métier, à nos
produits. Entre paysans, nous en parlons beaucoup car cette explosion de la
vente à la ferme, des circuits-courts et du local est un réel changement.
Alors, il est primordial qu’entre acteurs nous soyons solidaires afin d’éviter
des discordes.
(AGPL) : Quelles types de tensions peut occasionner la vente
directe ?
(MH) : Le secteur agroalimentaire est fait d’une grande
diversité de métiers. Il y a les producteurs et, bien entendu, la grande
distribution. Mais il y a aussi de nombreux artisans ayant des commerces locaux
comme les bouchers, les boulangers et les laitiers. Tous ont des savoir-faire
propres et des commerces. Prenons le cas des boucheries. En tant qu’agriculteurs,
nous leur fournissons de la viande qu’ils transforment et vendent. Avec
l’accroissement de la vente à la ferme, il est possible que certains
agriculteurs deviennent concurrentiels entre eux mais aussi avec les artisans
locaux.
(AGPL) : Qu’en est-il de la problématique liée à la main d’œuvre
étrangère, dans l’incapacité de venir en Suisse en raison de la crise ?
(MH) : Un récent communiqué de l’Union Suisse des Paysans
confirme qu’il n’y aura pas de problème. Mais la question pourrait se poser
au-delà de la crise, sachant qu’effectivement la majeure partie des saisonniers
sont étrangers. Sachant que nous étions dans un pays en quasi plein emploi, je
trouve très bien de pouvoir travailler avec cette main d’œuvre qui possède
d’autres expériences. Toutes les personnes que j’ai côtoyées et avec qui j’ai
travaillé sont assidues, efficaces et il faut les valoriser. En outre, si le
métier d’employé agricole était mieux coté, alors peut-être que plus de jeunes
suisses oseraient s’y intéresser.
(AGPL) : Comme faire évoluer nos systèmes tout en respectant les
métiers de chacun ?
(MH) : Je n’ai hélas pas de réponse facile. Aujourd’hui plus
que jamais, nous devons travailler ensemble et s’appuyer sur tous les acteurs
des circuits-courts afin de valoriser les métiers. Pour ce faire, nous devons
éviter la concurrence déloyale qui pourrait mettre en péril des commerces
locaux et évoluer conjointement. Ce n’est pas toujours pratique courante dans
le monde agricole mais tous les jeunes exploitants que je connais sont motivés
à le faire. Et puis, surtout, il faut que l’intérêt des consommateurs se perpétue
après la crise, et que les produits soient achetés aux prix corrects.
(AGPL) : Est-ce que cette reconnaissance devrait passer par des
labels « locaux » ou une médiatisation accrue de vos pratiques ?
(MH) : En effet, la reconnaissance via les labels peut aider.
Cependant il y en a tellement qui existent qu’il est parfois difficile de s’y
retrouver. Je pense que la clé est aussi par le lien que nous pouvons tisser
entre humains. Il est vrai qu’en tant qu’agriculteurs nous pouvons mieux
communiquer. Depuis toujours et bien avant la crise, notre objectif a été de produire
des denrées de qualité afin de nourrir sainement notre population. S’il a fallu
une telle crise pour que les consommateurs en prennent pleinement conscience, c’est que nous pouvons faire mieux. Dorénavant est crucial que le lien entre
consommateurs et producteurs soit maintenu, par chacun de nous et au-delà de la
crise actuelle.
Événements et agenda
Découvrez tout ce que vous devez savoir sur les plus importants salons professionnels de l'alimentation.
Évènements à venir Évènements passés